Nous donnons aujourd’hui la parole à Hervé Felgerolles, responsable de la cellule BEA et référent Bâti scolaire de l’académie de Lyon ! Dans cette interview, il nous explique les objectifs de sa mission, nous parle des principaux projets actuels tout en revenant sur l’évolution du bâti scolaire et nous guide vers les ressources mises à disposition en la matière.
Hervé Felgerolles, depuis novembre 2021 vous êtes officiellement le référent bâti scolaire de l’académie de Lyon. En quoi consiste ce rôle et quels sont les objectifs de cette nouvelle mission ?
Il y a maintenant trois ans, en octobre 2018, le ministère de l’Éducation nationale a décidé de créer une cellule nationale dédiée au bâti scolaire. Puis l’année dernière, en octobre 2021, de créer des cellules académiques pilotées par des référents Bâti scolaire nommés par les recteurs. Ces référents ont des profils différents : inspecteurs pédagogiques, personnels de direction, conseillers de prévention… Pour ma part, j’ai d’abord été amené à m’intéresser aux problématiques de transformation des espaces d’apprentissage lorsque je dirigeais un collège qui avait été retenu pour un plan numérique. Je suis ensuite devenu DAN (Délégué Académique au Numérique éducatif) adjoint de l’académie de Lyon, ce qui m’a permis de participer au projet de création d’un lycée innovant doté d’une forte coloration numérique – le lycée Docteur Charles Mérieux – et qui intégrait dans sa globalité de nouveaux espaces d’apprentissage. J’ai ensuite copiloté avec l’IFÉ-ENS de Lyon la création de la cellule Bâti et Espaces d’Apprentissage, qui était une cellule préfiguratrice. Celle-ci est récemment devenue la cellule bâti scolaire de l’académie de Lyon.
Aujourd’hui, le rôle de référent bâti scolaire s’organise autour de cinq axes :
- Décliner les orientations nationales sur le bâti scolaire en lien avec les collectivités territoriales et les usagers ;
- Identifier les besoins sur le territoire académique ;
- Partager et diffuser une culture autour du bâti scolaire au sein de l’académie : il s’agit notamment de faire de l’animation, de la formation, de la communication, d’essayer de créer un vivier de personnes ressources, de visiter des établissements, de sélectionner et de valoriser des projets remarquables…
- Conseiller les collectivités territoriales, ce qui passe par organiser des phases de dialogue, réfléchir avec les élus et les services à la stratégie patrimoniale, les aider à mener des appels à projet ou à concevoir des appels à manifestation d’intérêt, conduire des expérimentations et plus largement travailler à co-définir avec elles comment piloter les processus d’accompagnement de projet auprès des établissements.
- Enfin, la mission du référent bâti scolaire va aussi être de construire le bilan et l’évaluation des actions engagées, et de valoriser les réalisations aux échelles académique et nationale.
Dans les mois qui viennent, l’enjeu va être de rendre opérationnel ces cinq axes sur le territoire de l’académie de Lyon en engageant l’ensemble des acteurs concernés : autorités académiques, collectivités territoriales, opérateurs, établissements y compris les enseignants, les parents d’élèves, les personnels de vie scolaire, de direction, les agents, les élèves etc.
Une des spécificités de la cellule BEA est d’être engagée dans des collaborations avec des acteurs issus d’un écosystème large. Notre réflexion s’appuie en premier lieu sur les travaux de la recherche, dans le cadre d’une collaboration privilégiée avec l’IFÉ-ENS de Lyon et également avec Laurent Jeannin du laboratoire BONHEURS de l’université de Cergy-Pontoise. Nous travaillons aussi avec les entreprises, par exemple des entreprises de mobilier scolaire ou du secteur des edTech.
La cellule s’est en effet positionnée dès le début au centre d’un ensemble d’acteurs territoriaux impliqués dans l’évolution de la forme scolaire. L’idée sous-jacente est que la réflexion sur les nouveaux espaces d’apprentissage permet d’engager les équipes sur des thèmes transversaux comme le bien-être des élèves, la qualité de vie au travail, la transition écologique, l’ouverture sur les territoires et ainsi faciliter la diversité des pratiques pédagogiques. Il s’agit bien d’aider les établissements et les collectivités à aller vers des espaces pour apprendre, pour enseigner et pour inclure.
C’est d’ailleurs ce type de configuration, avec la volonté de faire travailler ensemble le maximum d’acteurs sur le territoire, qu’on retrouve dans l’AMI sur l’innovation dans la forme scolaire.
Sur l’académie de Lyon, comment évolue le bâti scolaire et quels sont à l’heure actuelle les principaux projets et les principaux acteurs ?
La cellule BEA a émergé et s’est imposée sur les trois dernières années en tant que référence et point d’entrée sur le territoire académique. L’académie de Lyon a été le terreau, depuis plusieurs années, de projets de transformation des espaces d’apprentissage – les projets ECLA, IDMAN, collèges lab… – qui ont d’ailleurs à plusieurs reprises été primés au niveau national. Sur cette base s’est créée notre cellule, première cellule préfiguratrice sur le bâti scolaire, qui nous donne aujourd’hui un vécu fort et une avance dans tout ce qui est structuration, conduite de projet, ressources, formation par rapport aux autres académies.
Les collaborations qui se sont mises en place avec différentes collectivités ont permis de travailler sur la co-conception de projets de construction et de rénovation d’établissements scolaires, en essayant de renforcer l’intégration des usagers. On a ainsi travaillé avec le Conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes sur plusieurs constructions de lycées neufs (lycées Docteur Charles Mérieux, de Gex, de Meximieux) ou encore avec la Métropole de Lyon sur des collèges neufs à Vénissieux ou Albigny-sur-Saône ou sur des restructurations concernant les collèges Jean-de-Tournes et Alain. On a également accompagné des projets à une échelle plus réduite comme par exemple dans le cadre de l’appel à projet Imaginons le lycée de demain, ou encore avec le Conseil départemental de la Loire, pour des démarches de transformation de salles de sciences, de salles polyvalentes, la création de salles lab, la mise en place de salles de classe défonctionnalisées, l’intégration de mobiliers innovants dans des salles de classe mais également dans d’autres espaces comme les couloirs, les halls, les foyers. Enfin, nous avons également aidé plusieurs collectivités à apporter des évolutions à leur référentiel de construction, ce qui a permis d’intégrer des retours d’expérience réussie sur le terrain.
Ces diverses expériences doivent profiter à l’ensemble des établissements scolaires, écoles, collèges et lycées. C’est la raison pour laquelle nous développons une dimension pédagogique forte dans ces projets, qui comportent souvent un volet de formation et des collaborations avec les corps d’inspection.
Enfin, outre ce travail d’accompagnement de projets qui prend beaucoup de temps et qui sollicite fortement les ressources humaines de la cellule BEA, nous avons développé deux autres axes forts d’intervention. D’une part l’acculturation et la montée en compétence des acteurs par le biais de séminaires et de formations, à l’image des séminaires Terrains d’apprentissage et des ateliers Espaces croisés. Et d’autre part un gros travail de veille, de capitalisation et de mise à disposition de ressources via le site internet BEA. Un important effort de communication est réalisé depuis l’année dernière avec une lettre d’information – la BEA@ctu – et une présence active sur les réseaux sociaux Twitter et LinkedIn.
Pour un établissement qui voudrait réfléchir et transformer ces espaces scolaires, quels sont les outils et les ressources à disposition ?
Il existe de nombreuses ressources sur le site académique de la cellule BEA, sur le site national Bâtir l’école ensemble ou encore sur le site Archiclasse qui est le site ministériel historique sur les aménagements des espaces scolaires. Concrètement, pour un établissement qui veut amorcer une réflexion ou engager un projet, la cellule BEA est la porte d’entrée. Par le biais de son directeur ou de son chef d’établissement, l’établissement est invité à saisir la cellule BEA pour exposer son questionnement ou son projet, dans le cadre d’un rendez-vous qui est pris avec un chargé de projet de la cellule. En cas de projets complexes, de restructuration ou de rénovation globale, le contact se fera directement avec le référent Bâti scolaire et en lien direct avec la collectivité de référence. A partir de là, la démarche consiste à mettre en place un travail de co-design de l’espace à transformer, articulé à un dispositif de formation qui sera réalisé dans le cadre de l’EAFC.
Le ministère a sorti récemment une série de documents – guides, fiches techniques, cahiers d’expertise… Comment peut-on s’approprier ces documents et à quoi servent-ils concrètement pour les établissements scolaires et les collectivités territoriales ?
Il est important de comprendre que ces documents ne sont pas des référentiels, c’est-à-dire des documents prescriptifs. Ce sont des documents synthétiques d’orientation, qui constituent une bonne entrée en matière pour les démarches de transformation d’un espace scolaire. La collection devrait d’ailleurs s’étoffer dans l’année qui vient, avec de nouvelles fiches espace et de nouvelles thématiques qui vont être développées. Ces documents sont complémentaires aux ressources mises à disposition par la cellule BEA. En effet, il s’agit de ressources génériques, là où les ressources BEA sont issues de retours d’expérience locaux. D’une manière générale, la cellule BEA est toujours prête à travailler sur une question spécifique locale, qui demanderait une réflexion contextualisée et territorialisée.